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Dans ce collège du Puy-de-Dôme, des élèves sensibilisés aux discriminations et à l'empathie

Dans ce collège du Puy-de-Dôme, des élèves sensibilisés aux discriminations et à l'empathie
Au collège, les thématiques abordées sont tournées vers l'acceptation de soi et des autres © X.GRUMEAU - RVA

Depuis plusieurs années, des associations comme SOS homophobie réalisent des interventions en milieu scolaire pour sensibiliser les collégiens contre les discriminations. Nous avons pu assister à un atelier au collège de Châtel-Guyon (Puy-de-Dôme).

Il est 10 h 30 lorsque nous arrivons au collège de Châtel-Guyon (Puy-de-Dôme). La sonnerie vient de retentir après la récréation et les élèves d'une classe de 4ᵉ arrivent dans la salle. Les chaises sont disposées en arc de cercle, ouvertes en direction d'un vidéoprojecteur projeté sur un tableau blanc. L'association SOS homophobie est là pour accueillir les adolescents. Elle effectue des dizaines d'interventions en milieu scolaire chaque année, un peu partout en Auvergne.

Les collégiens s'installent et les deux intervenant.e.s se présentent en rappelant quatre règles aux élèves : écouter les autres, ne pas juger, être bienveillant et respecter la confidentialité. Un ou une représentant.e de l'établissement est assis.e au fond de la classe (infirmière, professeur, CPE, etc.). Il ou elle n'a le droit d'intervenir, sauf en cas de chahutage. Sa présence comme témoin est utile en cas de litige pour rendre compte de ce qui a été dit. La discussion se met en place pour une durée de deux heures.

 

Briser la glace

Malgré la bonne humeur des deux bénévoles, il n'est pas facile de briser la glace. Certains élèves participent volontiers à l'exercice, mais d'autres préfèrent rester dans le mutisme au début.

Pour les mettre en confiance, les premiers sujets concernent les discriminations : en raison de la couleur de peau, du genre, de la sexualité, du handicap, etc. Les sujets sont raccrochés au cours d'histoire et de SVT que les élèves ont pu étudier avec leurs professeurs (l'esclavage par exemple). Un premier sujet débloque les collégiens. Cela concerne les peines encourues en cas de discrimination. Beaucoup ne s'attendaient pas à de fortes amendes ou même à de la prison.

Petit à petit, une confiance s'installe entre les participants et les échanges sont plus fluides. On parle alors de clichés, de harcèlement, de sexisme ou encore d'homophobie. Les intervenant.e.s définissent également avec précision certaines notions comme le sigle LGBTQIA+, avec des exemples tels que des personnalités connues ayant fait leur coming-out (Angèle, Tom Daley, Eliott Page, etc).

 

Comment réagir à un coming-out ?

La question du coming-out a occupé une bonne partie de la séance. En particulier sur la manière dont les adolescents pourraient réagir à l'annonce d'une autre personne. Certains élèves proposent de "féliciter" la personne ou de la défendre face à des attaques potentielles.

D'autres parlent de "respecter le choix" de la personne. Un débat se crée sur la notion du "choix" pour parler de la sexualité ou du genre d'une personne. Les intervenant.e.s retournant la question aux élèves : "quand est-ce que vous avez décidé et fait le choix de votre sexualité ?". La plupart s'interrogent sur la question. D'autres tentent de répondre dans un sourire narquois : "je ne sais pas, dès l'âge de trois ans, comme ça". Face à cette impasse, les bénévoles changent de sujet.

La séance se termine sur un dernier exercice. Les élèves peuvent noter sur un morceau de papier une question ou une remarque qu'ils n'osent pas dire à voix haute devant leurs camarades. Les bénévoles de SOS homophobie en profitent pour évoquer leur vécu.


Les élèves étaient libres de poser des questions, sans être jugé © X.GRUMEAU - RVA

 

Dire les choses avec pédagogie

Tout au long de la matinée, les élèves ont pu exprimer leur point de vue librement. Même en cas de désaccord avec les bénévoles de SOS homophobie, les adolescents ne sont pas brusqués. Ils sont simplement questionnés sur leur fil de pensée.

Nos interventions en milieu scolaire sont là pour sensibiliser les jeunes sur l'importance de lutter contre les clichés et les dégâts que peuvent engendrer les discriminations. On a beaucoup de questions sur ce que ça fait d'être homosexuel, d'être trans ou intersexe. On est là pour humaniser les réponses apportées aux élèves, car on peut aussi parler de notre vie et de notre vécu.

Lancelot, bénévole à SOS Homophobie

En tout cas, l'association SOS homophobie est très claire sur le contenu qu'elle évoque avec les élèves. Loin des idées reçues de certains parents d'élèves ou de collectifs voulant empêcher les enfants de discuter de certains sujets.

On a un agrément avec l'Éducation nationale. Il y a des choses que l'on ne va pas aborder parce qu'on n'a pas le droit d'en parler. Par exemple, on ne parle pas de pratiques sexuelles avec les enfants. Ce n'est pas du tout le propos de nos interventions. Nous, on est surtout là pour parler du vivre ensemble, de l'éducation à la citoyenneté.

On parle un peu de vie affective parce qu'on tombe amoureux d'autres personnes dans la vie. Mais on dit simplement que ça existe, on ne parle pas d'intimité.

Lancelot, bénévole à SOS Homophobie

L'idée, c'est donc surtout de faire de la pédagogie, mettre des mots sur des situations ou des choses auxquelles les adolescents sont ou seront confronté dans la vie.

Par exemple, les intervenant.e.s ont défini ce qu'était la transidentité de manière très terre-à-terre en se basant sur la médecine, la biologie. À aucun moment, il n'a été évoqué des questions sur le parcours de transition, les parties intimes ou ce qui concerne la vie privée. Les enfants ne sont jamais pris à partie ou remis en question, sur aucun des sujets, encore moins pour questionner leur identité ou leur sexualité.

Après la séance, les élèves ont continué à discuter entre eux des sujets abordés avec l'association SOS homophobie. La plupart d'entre eux semblent satisfaits d'avoir pu discuter librement de ses sujets et d'avoir été écoutés sans jugement.

Moi, je trouve ça très bien qu'on en parle à voix haute. On peut partager nos ressentis et ce que l'on pense. Il devrait y en avoir plus et je trouve ça très important d'en parler.

Camille*, élève de 4e

 

Je ne savais pas qu'on pouvait aller en prison si on faisait de la discrimination. Je ne connaissais que les trois premières lettres de LGBTQIA+. Moi, je peux en parler librement à la maison avec mes parents. Et même si on a un programme anti-harcèlement au collège, c'est bien qu'on ait cette intervention.

Lou*, élève de 4e

 

C'est une bonne chose. Ça permet de savoir comment mieux réagir envers les personnes qui font leur coming-out. On a aussi pu réfléchir aux conséquences que cela peut causer. Déjà au collège, on risque des heures de colle et un conseil de discipline si on fait de la discrimination.

Alix*, élève de 4e

 

Après le cours, il en résulte une conclusion assez claire. Les enfants ont leur conscience propre. S'ils sont intéressés ou qu'ils s'interrogent sur leur sexualité, leur identité et leur bien-être, ils seront attentifs et curieux. Et ceux qui ne se sentent pas concernés par le cours, ont discuté dans leur coin, ont été moins participatifs, mais n'ont pas été forcés à l'être. Ce type d'intervention est là pour ouvrir leur esprit, mettre des termes sur certaines questions et développer leur empathie envers les autres.

À la rentrée prochaine, toutes les écoles publiques mettront en place trois séances par an. En maternelle et en primaire, il sera question de vie affective et relationnelle : apprendre à se connaître, comprendre le consentement, encourager les élèves à s'exprimer, à faire des choix, respecter les autres, prévenir des violences sexistes et sexuelles. Au collège et au lycée, les adolescents seront sensibilisés à d'autres sujets en fonction de leur âge : lutte contre les discriminations, prévenir le harcèlement, prévention sur les IST, danger sur internet.

Vous pouvez retrouver les programmes sur le site de l'Éducation nationale.

*Les prénoms ont été modifiés

X.GRUMEAU